François Kersaudy Avec son film, Steven Spielberg a conféré à Oskar Schindler, jusque-là inconnu du grand public, une renommée mondiale ; en attribuant un titre analogue, La Liste de Kersten à son dernier ouvrage, François Kersaudy entend sans doute accorder un mérite similaire à son personnage, Felix Kersten. Balte de langue allemande, Kersten naît en 1898 dans ce qui est aujourd’hui l’Estonie. Vers la fin de la Première Guerre Mondiale, il découvre qu’il dispose d’une aptitude particulière pour guérir les douleurs à l’aide de ses mains très sensibles, effectuera des études de massage finlandais à Helsinki, acquerra la nationalité finlandaise et se constituera en qualité de praticien alternatif une clientèle de renom principalement à La Haye et dans le Berlin de l’entre-deux guerres. A sa patientèle composée essentiellement de riches industriels et d’aristocrates viendra un jour s’ajouter celle de Heinrich Himmler, chef de la SS et des services secrets, en proie…
Article publié dans “Critiques et recensions”
Civilisation
Lord Kenneth Clark En 1969, Kenneth Clark [1] présente à la BBC un documentaire en treize épisodes qui retrace l’histoire de l’art en Occident depuis la chute de l’empire romain. Intitulée Civilisation, la série constitue la première présentation télévisée et en couleurs de l’histoire des beaux-arts à destination d’un public généraliste. L’émission connaîtra un succès considérable, jamais démenti jusqu’à ce jour, tant auprès des critiques que du grand public. De son émission, Clark tirera un livre qui sera traduit en français en 1974 et dont Guillaume Villeneuve propose aujourd’hui une nouvelle traduction aux Éditions Nevicata. Clark, disparu en 1983, s’était montré critique envers cette première traduction, en particulier envers sa couverture, qu’il jugeait criarde. A près d’un demi-siècle de distance, il fournit à Villeneuve non seulement le prétexte d’une traduction fraîche, élégamment illustrée de clichés en couleur cette fois-ci, mais l’occasion de repenser l’ouvrage. De la série télévisée au livre…
L’idée impériale
Habsbourg, incarnation de l’idée impériale Die Reichsidee, selon Otto de Habsbourg Dans ce livre ambitieux, Visions of Empire, l’auteur, Krishan Kumar, s’attaque à l’examen des idées et des idéologies qui ont présidé à l’établissement et à la gouvernance des différents empires sur lesquels il fonde son étude : les empires romain, ottoman, habsbourgeois, russe, britannique et français. Fondamentalement, la notion d’empire, die Reichsidee, selon le titre d’un ouvrage de l’Archiduc Otto de Habsbourg, se distingue de celle, plus récente, de l’État-nation, dont la France constitue sans doute à la fois le prototype et l’exemple le plus achevé. Du reste, l’auteur, Krishna Kuman, né en 1942 à Trinidad et Tobago, actuel doyen de la faculté de Sociologie à l’Université de Virginie et citoyen britannique, s’estime lui-même être le fruit de cette notion d’empire, britannique en l’occurrence. L’Empire avant l’Etat-nation Dans l’histoire du monde, les empires ont précédé de trois millénaires l’émergence de…
Le Service aux Cygnes: témoin de l’histoire de la famille Brühl
Une histoire de la famille Brühl
La Mort: Méditation pour un Chemin de Vie
Monseigneur Aupetit Voilà un an que la pandémie s’est répandue sur la face de la terre et que notre société débat de couvre-feux, de confinements et de dépistage et maintenant de vaccination. Le grand absent de ces débats, y compris, dans l’ensemble, parmi les ecclésiastiques, est la mort, une réalité à laquelle notre société n’est plus capable de faire face. A cet égard Monseigneur Michel Aupetit fait figure d’exception et vient apporter un double regard sur notre société covidienne, celui du médecin généraliste qu’il a été pendant onze ans et celui du prêtre, l’actuel archevêque de Paris. Mgr Aupetit ne critique pas les mesures sanitaires en tant que telles mais met en garde contre leur essentielle insuffisance et le risque de laisser toute notre vie régie par des mesures hygiénistes techniques qui détruisent notre humanité, en particulier en limitant les rapports sociaux. A titre d’exemple, les visites dans les maisons…
La chute des chevaliers
Ordre de Malte Le limogeage en novembre 2020 du Cardinal Becciu, entre autres délégué spécial du Pape auprès de l’Ordre de Malte, vient rappeler les affaires qui ont secoué l’Ordre ces dernières années. Aussi l’ouvrage tout récent de Konstantin Magnis tombe à point nommé pour raconter ces événements, sorte de polar ecclésiastique fondé, pour autant que La Nouvelle Ligne puisse en juger, sur un compte-rendu exact des faits, que l’auteur relate de façon fluide avec un mélange de détachement et d’intimité. Deux pistes s’y croisent : d’une part la lutte qui oppose le Grand Maître Matthew Festing et son entourage à Albrecht (Freiherr von) Boeselager, Grand Hospitalier et puis Grand Chancelier de l’Ordre, et qui conduira elle-même à une confrontation entre l’Ordre et le Saint-Siège et à la démission forcée de Festing, et d’autre part une histoire d’argent liée à un trust administré à Genève, dont l’Ordre de Malte est certes…
La couronne découverte
The Crown – saison 4. En début d’année, à l’occasion de la diffusion de la saison 3 de The Crown, La Nouvelle Ligne exprimait sa préoccupation face à la capacité d’une entreprise capitalisée à 144 milliards de dollars à forger l’opinion que le monde entier se fait de la famille royale britannique. En cette fin d’année, La Nouvelle Ligne doit avouer devoir réviser son jugement puisque Netflix est désormais capitalisée à 244 milliards de dollars. Entretemps, les abonnés de Netflix qui auront regardé The Two Popes se seront familiarisés avec les mécanismes que déploie la chaine en ligne : une histoire inspirée par des événements réels où se mêlent faits avérés et scènes de fiction, que l’insertion d’actualités d’époque vient brouiller davantage encore, sans que le spectateur ne sache s’il a affaire ou non à un documentaire. The Crown -saison 4, de la réalité à la fiction La saison 4,…
Agent Sonya
Ben MacIntyre, un véritable récit d’espionnage. Ecrivain britannique de renom, Ben Macintyre a su se forger au fil des ans une solide réputation en qualité d’auteur spécialiste des récits d’espionnage qui se fondent sur une histoire vraie, et dans lesquels il reprend le style, le ton et la cadence propres à un roman policier. Il rencontrera un succès littéraire mérité avec Agent Zigzag et plus encore avec Operation Mincemeat, le récit d’une tromperie étonnante élaborée par les Anglais aux dépens des Allemands pendant la Deuxième Guerre Mondiale, et qui effectivement tient le lecteur en haleine à la manière d’un polar. Dès lors que Macintyre n’est pas un auteur de fiction, il se confronte à la difficulté existentielle du genre qu’il s’est choisi, à savoir l’identification d’une véritable histoire d’espionnage suffisamment documentée et surtout suffisamment romanesque. Car la vie de la plupart des espions se déroule derrière un bureau et ne…
L’Anarchie
William Dalrymple Avec The Anarchy, William Dalrymple renoue avec son sujet de prédilection, les relations entre Anglais et Indiens dans les deux siècles qui précèdent l’établissement de l’Empire des Indes en 1858. L’anarchie que suggère le titre renvoie au déclin de l’empire moghol dès le XVIIIe siècle, qui favorise l’émergence de la Compagnie anglaise des Indes orientales, la East India Company (EIC), et qui devient même l’acteur principale de ce déclin. Il est malaisé pour le lecteur occidental qui, comme La Nouvelle Ligne, manque de points de repères quant à l’histoire de l’Inde, de s’y retrouver parmi cette anarchie. La Nouvelle Ligne serait tentée de dresser un parallèle avec la Guerre de Trente Ans en Europe au XVIIe siècle, une guerre longue, aux allégeances et rivalités changeantes qui oppose un empereur, ici le Moghol et là le Habsbourg, aux princes territoriaux, une guerre incessante avec son cortège de pillages, de…
La Filière: une histoire de guerre, d’amour, de fuite et de mort
Philippe Sands Les lecteurs de La Nouvelle Ligne se souviendront d’un personnage qui surgissait des entrailles de « Retour à Lemberg », Otto (Freiherr von) Wächter, général de la SS et gouverneur de Cracovie en Pologne occupée puis de Galicie, dont Lemberg est la capitale, pendant la guerre. La Filière, du même auteur Philippe Sands, ne constitue pas à proprement parler une suite à Retour à Lemberg mais s’inscrit néanmoins dans une sorte de continuité dans la mesure où le livre retrace la vie, puis la fuite et enfin la mort d’Otto Wächter. Le titre anglais, The Ratline, évoque un réseau d’évasion mais le terme rat, bien entendu dénigrant, renvoie à des criminels qui fuient la justice plutôt qu’à des héros qui cherchent à échapper à l’oppression. En l’occurrence il s’agit d’une ligne d’évasion qui vise à procurer assistance à des criminels de guerre en vue de gagner l’Amérique latine dans les…









