Les rois ne se confient pas pourtant. C’est sur cette phrase que s’ouvrent les mémoires du Roi Juan-Carlos qui paraissent ces jours-ci en français avant même leur traduction en espagnol le mois prochain. Aux oreilles d’un lecteur de langue française, la phrase évoque l’ouvrage que Gérard Davel et Fabrice Lhomme avaient consacré en 2016 à François Hollande, Un Président ne devrait pas dire ça.
Juan-Carlos: des aveux qui peinent à convaincre
En dépit de sa propre mise en garde, Juan-Carlos lui va se confier abondamment et passer en revue sa famille, ses maîtresses, ses comptes dissimulés en Suisse et les chasses au Botswana. Et s’il a pu commettre des erreurs, ce n’étaient ma foi que des erreurs de jugement, comme accepter ce cadeau de la part du Roi d’Arabie à hauteur de cent millions de dollars, qui a pu créer l’impression fâcheuse qu’il s’agissait d’un pot de vin. Ensuite, il y a la belle Corinna, avec qui il a entretenu une relation aujourd’hui jugée regrettable, d’autant qu’elle s’est achevée sur un procès et une transaction de 65 millions de dollars. Ah oui, et n’oublions pas ce malheureux éléphant mort, dont la chasse est interdite au Botswana. Mais, au soir de sa vie, quel est l’homme qui ne ploie sous le poids des regrets ?
Juan-Carlos: des mémoires qui irritent
Le titre Réconciliation suggère un ballon d’essai dans le chef du roi émérite qui, né en exil à Rome en 1938 et désormais en exil à Abou Dabi, tente de discerner si les conditions d’un retour définitif en Espagne se présentent à lui. ¡No !, répondent les talk-shows que La Nouvelle Ligne a pu regarder sur YouTube : trop de femmes, trop d’argent, trop de mélanges entre la vie privée et la vie privée. Trois éléments en particulier viennent irriter la presse espagnole. Tout d’abord, si Juan-Carlos est certes un Bourbon, il est l’ancien Roi d’Espagne, pas de France ; aussi la parution initiale de ces mémoire en français, en réalité due à la plume de Laurence Debray (fille de Régis), qui a agi comme nègre du roi, fait grincer en Espagne. Ensuite il ne se prive pas au fil de ses mémoires d’égratigner sa famille et donc l’institution monarchique qu’il a lui-même incarnée. Enfin il y évoque avec émotion la mémoire du Général Franco, dont on célèbre le cinquantenaire de la disparition ces jours-ci ; certes Juan-Carlos a le droit à ses sentiments personnels, mais c’est mal juger de la température politique qui prévaut en ce moment en Espagne.
Juan-Carlos: un homme qui ne hume plus l’odeur de son peuple
En 1981, lorsque Juan-Carlos avait joué un rôle de premier dans la mise en échec de la tentative de putsch de Tejero, il avait correctement senti que le peuple espagnol ne souhaitait pas un retour de franquisme. Aujourd’hui ce livre témoigne au contraire de sa déconnexion avec la réalité espagnole. Cette réconciliation masque en fait une quête de réhabilitation, dont il n’est pas certain que l’opinion publique la lui accorde. Non décidément, un roi de devrait pas dire ça.
Juan Carlos 1er d’Espagne, Réconciliation, Stock, 2025.





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