Communiqué du Prince Andrew
Le 17 octobre dernier, le Prince Andrew, frère du roi d’Angleterre, publiait un communiqué dans lequel il déclarait, après avoir consulté le Roi Charles III, renoncer à l’usage de son titre de Duc d’York, du prédicat d’Altesse Royale et des autres honneurs qui lui avaient été conférés, parmi lesquels la prestigieuse dignité de chevalier de l’Ordre de la Jarretière.
La cause immédiate de ce communiqué est la divulgation quelques jours auparavant de courriels envoyé par le Prince à feu Jeffrey Epstein, après que celui-ci ait été condamné pour faits de pédophilie. Non seulement s’agit-il là d’une grave erreur de jugement, mais l’existence de ces courriels semblent démentir les affirmations du prince lors d’une entrevue accordée à la BBC en 2019. Une partie de la presse britannique n’a pas hésité à qualifier le prince de menteur.
A cela s’ajoutent les contacts entretenus par le Prince avec Yang Tengbo, un homme d’affaires chinois, interdit d’entrée du territoire du Royaume-Uni en 2023 au motif qu’il utilisait ces contacts à des fins d’espionnage.
Derrière l’agrément du roi qu’évoque le communiqué, il faut sans doute lire la pression exercée par le Palais, et peut-être aussi par le gouvernement, pour que le prince renonce de lui-même aux honneurs, qu’à défaut on lui aurait retirés sous la contrainte.
Le Prince Andrew, présumé innocent
Il est important de souligner que le prince n’a jamais été condamné dans une cour de justice pénale, bien qu’en revanche, en février 2022, le prince avait conclu un accord à l’amiable avec Virginia Giuffre. Elle avait intenté en effet une procédure civile à son encontre, dans laquelle elle affirmait avoir été contrainte d’entretenir des relations sexuelles avec le prince, alors qu’elle était encore mineure, victime d’un trafic sexuel mis en place par Jeffrey Epstein et sa complice, Ghislaine Maxwell, aujourd’hui condamnée et incarcérée.
Voilà donc le prince toujours présumé innocent. En réalité, il a été reconnu coupable non pas par une cour de justice, mais par l’opinion publique britannique, qui réclamait sa tête depuis plusieurs jours. Si le Roi a forcé la main du prince, alors on peut penser que l’opinion publique a forcé celle du Roi.
La Nouvelle Ligne a plusieurs fois eu l’occasion d’exprimer son point de vue selon lequel, quel que soit l’arrangement constitutionnel, tout conflit qui oppose le peuple à la Couronne, s’achève sur la victoire du peuple.
Quelles leçons tirer ?
Une foule. La première est que les membres des familles royales qui souhaitent mener leur vie privée comme ils l’entendent, notamment dans le domaine des affaires, sont priés de quitter l’institution. La Reine Elisabeth II avait raison à cet égard au sujet de Harry et Meghan ; il ne saurait être question d’avoir un pied dedans en un pied dehors.
La seconde est que ceux qui souhaitent servir l’institution monarchique se soumettent à la gouvernance du gouvernement. Si le Prince Andrew a pu faciliter l’accès auprès de dignitaires étrangers, il a pu aussi donner l’impression de mener une diplomatie parallèle, où se mêlaient intérêts privés et publics, à l’insu du gouvernement, voire à son encontre.
La troisième est que les membres d’une famille royale se doivent non seulement d’être, mais de paraître, comme la femme de César, au-delà de tout soupçon. C’est peut-être encore davantage le cas pour la monarchie britannique, dont la légitimité repose sur le consentement populaire apporté à sa politique d’apparat.
Enfin, il y a fort à parier qu’à ces courriels en succéderont d’autres, qui risquent de jeter le discrédit plus encore sur le prince. L’action du Roi Charles III sera alors jugée à cette aune. Décision en temps et en heure ou décision tardive ; décision résolue ou aboutissement d’un train d’hésitations ; attitude bienveillante face aux agissements de son frère là où la fermeté était de mise. Charles III, qui se dévoue corps et âme à sa fonction, risque de ne pas sortir indemne de ce lamentable épisode.



Soyez le premier a laisser un commentaire