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Belges et Français

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La France, patrie des intellectuels

Cogito ergo sum. De l’avis de La Nouvelle Ligne, cette phrase célèbre résume au mieux l’esprit français, en l’occurrence un esprit qui produit une pensée abstraite, parfois, comme chez Michel Foucault, au mépris de la réalité. De cet esprit national surgit une espèce indigène propre à la France, l’intellectuel, dont le métier principal consiste à réfléchir à voix haute sur les événements qui agitent le monde ; songeons aujourd’hui à des personnalités comme Michel Onfray, Alain Finkielkraut ou Raphaël Enthoven. Chose plus extraordinaire encore, non seulement ces personnages existent-ils, mais ils rencontrent un large public. En Belgique en revanche, on s’en dispense tout simplement, on poursuit son bout de chemin, on vit sans.

La Grandeur, héritage du siècle de Louis XIV

Lorsque cette formule célèbre apparaît en 1637 dans le Discours de la Méthode de Descartes, la France est en passe de dominer le monde européen. Le XVIIe siècle ne s’appelle pas encore le Grand Siècle ou le Siècle de Louis XIV (qui ne naît que l’an suivant), mais il est déjà en devenir. Seuls trois personnages historiques, aimait à rappeler le professeur d’histoire de La Nouvelle Ligne il y a cinquante ans, seuls trois personnages donc ont jamais conféré leur nom à un siècle entier, Périclès, Auguste et ici Louis XIV.

La France qui naît de la matrice de la Gaule avec, mettons, le baptême de Clovis en 496, estime avoir pour destinée manifeste d’atteindre la grandeur et de la révéler au monde. « Il faut que la France soit un grand pays car, s’il ne l’était pas, que feraient les Français ? » déclarait le Général de Gaulle dans les années soixante du siècle dernier.

« Foutaises », répond le Belge, qui loin de vivre dans l’esprit de grandeur, vit dans le monde tel qu’il est, pétri de réalités charnelles.

A l’époque de De Gaulle, en dépit des belles réalisations des Trente Glorieuses, la messe est dite, la France n’est plus une grande puissance, au moins depuis la défaite de 1940 face à la Wehrmacht. Devenu Président, De Gaulle vendra aux Français l’illusion que la France a gagné la guerre alors qu’en réalité ce sont les Anglais, les Américains et les Soviétiques qui l’ont remportée. L’heure de la décolonisation a sonné, le pinard et les Gitanes cèdent le pas au Coca-Cola et aux Marlboros.

« Ce n’est pas grave, répond le Belge, en 1960 nous avons décampé du Congo en moins de six mois, et maintenant ce foutoir, ce n’est plus notre problème. Prends plutôt une bière, c’est meilleur que du Coca».

L’insoutenable légèreté de la Grandeur

Cependant, le grandiose héritage de la France, que le monde, y compris les Belges, admirent à juste titre, produit jusqu’à nos jours le mélange impossible de la suffisance et de l’impuissance. Cela est évident de nos jours en matière de politique étrangère ; le Président de la République, lointain héritier du Roi-Soleil, souhaiterait armer l’Ukraine mais n’en a pas les moyens, il souhaiterait mettre sur pied une politique européenne de défense, mais ne peut espérer parvenir à ses fins que s’il dupe ses voisins à la financer.

Car, estime le Belge, être français relève d’une corvée épuisante, où chacun se sent tenu d’incarner une destinée historique, Napoléon, Victor Hugo, Claude Monet. De plus, cette mission exige de maîtriser les lettres, de rédiger un livre, de citer les auteurs classiques au cours d’un débat télévisé, et de déclamer des proclamations solennelles à tout propos. Il existe même une école en France, l’ENA, vouée à l’apprentissage de ces talents. Non, trop is te veel, en Belgique on n’exige pas d’un conseiller communal qu’il connaisse Molière par cœur pour décider de l’installation d’un feu rouge.

Le bon sauvage, une vie paisible

Le Belge (et son voisin, le Chti) apparaît comme une sorte de bon sauvage, qui n’a cure des débats qui animent les salons parisiens, qui n’aspire pas à incarner l’excellence universelle. Cinquante après Coluche, le Belge est devenu une sorte de fou du roi qui tend au Français le miroir de son image, quelque peu ridicule dès lors qu’il s’estime plus grand qu’il ne l’est en réalité. « Ce n’est pas grave, répète-il une fois de plus, on vit très bien petit. Prend une deuxième dose de bière, c’est un remède souverain contre la grandiolite ».

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