Nazisme et noblesse La clé de lecture de ce livre réside sans doute dans le sous-titre, Histoire d’une Mésalliance. Au départ, tout oppose les national-socialistes, non seulement vulgaires et violents mais qui se réclament justement d’une forme de socialisme, à la noblesse conservatrice qui se conçoit elle-même comme une élite investie d’une mission. Pourtant ces deux groupes finiront par opérer un rapprochement, que l’auteur, Stefan Malinowski, qualifie de mésalliance. Qu’est-ce donc une mésalliance ? Une union qui brise les règles qui gouvernent leurs groupes respectifs, en l’occurrence un accord passé entre le peuple et la noblesse, mû par un mélange de passion et d’intérêts économiques et où les deux parties trouvent leur compte. Ici cette conjonction d’intérêt prend plusieurs formes : détestation du communisme et même de la démocratie, hostilité envers le capitalisme incarné par une bourgeoisie cosmopolite, etc. La noblesse allemande en 1918 En 1918, la noblesse allemande compte quatre-vingt mille…
Article publié dans “Critiques et recensions”
Voyage dans les pays baltes
Voyage dans les pays baltes. Derrière ce titre énigmatique, The Glass Wall, se dévoile un mélange de récits, de rencontres et d’évocations historiques que l’auteur Max Egremont a tiré de ses voyages dans la Baltique, principalement en Lettonie et en Estonie, mais aussi à Saint-Pétersbourg et en Finlande. Le titre entend suggérer que ces contrées ont été séparées de l’Europe de l’Ouest mais que ce mur en verre permet d’y jeter un regard ; l’analogie est curieuse car du point de vue des intéressés, les populations des pays baltes, ce mur, que les Soviétiques avaient érigé de 1939 à 1991, était solidement bétonné et n’a disparu qu’avec l’adhésion à l’Union Européenne, l’adoption de l’euro et la participation à l’OTAN. Les intérêts d’Egremont se portent donc sur la Lettonie et l’Estonie, deux territoires sous domination suédoise jusqu’à ce que Pierre le Grand ne les incorpore à l’empire russe en 1721 à la…
Aux origines de James Bond
Aux origines de James Bond «Mourir peut attendre», le nouveau James Bond n’aura pas fait démentir le succès de cette série où les spectateurs paient leur billet de cinéma pour se voir raconter la même histoire pour la vingt-cinquième fois, sans cesse mise à jour au fil des inventions techniques qui font succéder une Aston Martin à une autre. Pendant la guerre, Ian Fleming, le créateur du personnage de Bond, avait été officier au sein de la Royal Navy. Affecté au Service des Renseignements, il prit part à l’une des plus étonnantes entreprises de désinformation jamais effectuées, Operation Mincemeat, d’où il irait quelques années plus tard puiser l’inspiration pour ses premiers romans figurant James Bond. Le but de cette opération, menée en 1943, consistait à faire croire aux Allemands que le débarquement que les Alliés projetaient en Sicile se déroulerait soit en Crète soit en Sardaigne. Un faux noyé Aussi…
La comtesse, la musique et la guerre
Olivier Bellamy, La Folie Pastré Qui est Pastré et de quelle folie s’agit-il ? Olivier Bellamy, journaliste, animateur radio et surtout grand amoureux de musique classique a consacré ce petit ouvrage à la vie colorée de la comtesse Lily Pastré, marseillaise comme l’auteur. Née Marie-Louise Double de Saint-Lambert en 1891, héritière des apéritifs Noilly-Prat, elle épousera en 1918 Jean Pastré, comte pontifical, lui-même héritier de la maison de négoce Pastré Frères, et dont elle se séparera plus tard. Lily Pastré, la passion de la musique Car la véritable passion de Lily, cette comtesse aux allures de clocharde, c’est la musique, et Mozart en particulier. Entre les deux guerres, elle fréquente à Paris tant le monde tout court que le monde des arts et se lie avec les personnalités les plus en vue du moment. Mais c’est la guerre qui plus encore sera le révélateur de sa personnalité. Marseille est située en…
Dynasties juives de Shanghai
Jonathan Kaufman De Bagdad à Hong-Kong En 597 avant notre ère, Nabuchodonosor emmenait les Hébreux en déportation à Babylone, la future Bagdad, où jusqu’à une époque récente allait fleurir une des plus importantes communautés juives du Proche-Orient. Quelques vingt-cinq siècles plus tard, vers la fin du XIXe siècle, David Sassoon, issu de la plus éminente des familles marchandes juives mizrahim, allait quitter la ville, alors sous domination turque, pour gagner Bombay (aujourd’hui Mumbai), capitale économique de l’empire britannique des Indes ; ses descendants allaient poursuivre cette course et fonder des entreprises commerciales à Shanghai et à Hong Kong. Elly Kadoorie, quant à lui, appartient lui aussi à une famille, certes moins prestigieuse que les Sassoon, de financiers et de marchands juifs de Bagdad. Jeune homme, il quittera la ville et trouvera de l’emploi chez les Sassoon à Bombay, d’où il gagnera Hong Kong en 1880. Jonathan Kaufman, journaliste et professeur d’université…
Serhii Plokhy
La crise des missiles à Cuba – une nouvelle lecture On connaît la fin. La crise provoquée par le déploiement de missiles soviétiques sur l’île de Cuba en octobre 1962 n’a pas finalement débouché sur la guerre nucléaire. Tous, en Europe et aux États-Unis, connaissent l’histoire de cette crise aiguë telle que la racontent les Américains, et qu’un film, Thirteen Days, a rendu accessible au grand public en 2000. L’intérêt de Nuclear Folly, qu’on doit à la plume de Serhii Plokhiy, professeur d’histoire à l’Université de Harvard, est de s’appuyer notamment sur les archives aujourd’hui disponibles en Ukraine, l’Etat soviétique où étaient entreposés les missiles avant leur envoi à Cuba. Tout le monde sait que Kennedy et Khrouchtchev ont évité de peu la guerre nucléaire il y a près de soixante ans mais à la lecture du livre de Plokhiy, on découvre combien le risque d’un conflit était encore plus élevé…
La Liste de Kersten
François Kersaudy Avec son film, Steven Spielberg a conféré à Oskar Schindler, jusque-là inconnu du grand public, une renommée mondiale ; en attribuant un titre analogue, La Liste de Kersten à son dernier ouvrage, François Kersaudy entend sans doute accorder un mérite similaire à son personnage, Felix Kersten. Balte de langue allemande, Kersten naît en 1898 dans ce qui est aujourd’hui l’Estonie. Vers la fin de la Première Guerre Mondiale, il découvre qu’il dispose d’une aptitude particulière pour guérir les douleurs à l’aide de ses mains très sensibles, effectuera des études de massage finlandais à Helsinki, acquerra la nationalité finlandaise et se constituera en qualité de praticien alternatif une clientèle de renom principalement à La Haye et dans le Berlin de l’entre-deux guerres. A sa patientèle composée essentiellement de riches industriels et d’aristocrates viendra un jour s’ajouter celle de Heinrich Himmler, chef de la SS et des services secrets, en proie…
Civilisation
Lord Kenneth Clark En 1969, Kenneth Clark [1] présente à la BBC un documentaire en treize épisodes qui retrace l’histoire de l’art en Occident depuis la chute de l’empire romain. Intitulée Civilisation, la série constitue la première présentation télévisée et en couleurs de l’histoire des beaux-arts à destination d’un public généraliste. L’émission connaîtra un succès considérable, jamais démenti jusqu’à ce jour, tant auprès des critiques que du grand public. De son émission, Clark tirera un livre qui sera traduit en français en 1974 et dont Guillaume Villeneuve propose aujourd’hui une nouvelle traduction aux Éditions Nevicata. Clark, disparu en 1983, s’était montré critique envers cette première traduction, en particulier envers sa couverture, qu’il jugeait criarde. A près d’un demi-siècle de distance, il fournit à Villeneuve non seulement le prétexte d’une traduction fraîche, élégamment illustrée de clichés en couleur cette fois-ci, mais l’occasion de repenser l’ouvrage. De la série télévisée au livre…
L’idée impériale
Habsbourg, incarnation de l’idée impériale Die Reichsidee, selon Otto de Habsbourg Dans ce livre ambitieux, Visions of Empire, l’auteur, Krishan Kumar, s’attaque à l’examen des idées et des idéologies qui ont présidé à l’établissement et à la gouvernance des différents empires sur lesquels il fonde son étude : les empires romain, ottoman, habsbourgeois, russe, britannique et français. Fondamentalement, la notion d’empire, die Reichsidee, selon le titre d’un ouvrage de l’Archiduc Otto de Habsbourg, se distingue de celle, plus récente, de l’État-nation, dont la France constitue sans doute à la fois le prototype et l’exemple le plus achevé. Du reste, l’auteur, Krishna Kuman, né en 1942 à Trinidad et Tobago, actuel doyen de la faculté de Sociologie à l’Université de Virginie et citoyen britannique, s’estime lui-même être le fruit de cette notion d’empire, britannique en l’occurrence. L’Empire avant l’Etat-nation Dans l’histoire du monde, les empires ont précédé de trois millénaires l’émergence de…
Le Service aux Cygnes: témoin de l’histoire de la famille Brühl
Une histoire de la famille Brühl