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Le Bal des Illusions

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L’Illusion française.

Journalistes de renom, Richard Werly, François d’Alançon s’envolent, font le tour du monde et y mènent une enquête sur la France vue d’ailleurs. De retour en France, ils lui font rapport en quelque sort de la façon dont le monde la voit, l’invitent tout d’abord à tenir compte de ces points de vue et à les confronter avec la manière dont elle se pense elle-même. Le résultat de cette rencontre que provoquent les deux auteurs est Le Bal des Illusions, publié ces jours derniers chez Grasset.

Que cette confrontation des points de vue ait lieu est en soi en succès car la France, dont une certaine arrogance culturelle n’est jamais tout à fait absente, non seulement ne tient guère compte de ce que ses interlocuteurs, même bienveillants, lui disent, mais s’érige volontiers en donneur universel de leçons.

A l’heure où se déroulent des élections législatives sous la Ve République fondée par le Général de Gaulle, il est clair, aux yeux de La Nouvelle Ligne, mais aussi aux yeux des Français, que plus personne n’est en mesure d’endosser le costume du grand général. En 1958, le Général de Gaulle, auréolé du prestige de l’Appel du 18-Juin, a en quelque sorte vendu aux Français l’illusion que la France avait remporté la victoire sur l’Allemagne alors qu’en réalité cette dernière était le fait des (Anglo)-Américains ; siège au Conseil de Sécurité, puissance nucléaire, l’héritage d’un empire colonial, la prouesse économique des Trente Glorieuses, une tradition culturelle hors pair, tout cela au fond servait à entretenir cette illusion.

Revoir ses ambitions

Soixante-six ans plus tard, la France est confrontée à la nécessité amère de revoir ses ambitions à la baisse. Non seulement la France est désormais une puissance de deuxième rang derrière les Etats-Unis mais aussi derrière la Chine et peut-être l’Inde ou le Brésil aussi. Si De Gaulle avait présidé à l’accession des colonies à l’indépendance, il s’était empressé d’y substituer la Françafrique qui a disparu sous nos yeux ces dernières années sous le mandat d’Emmanuel Macron. Les troubles en Nouvelle-Calédonie procèdent sans doute aussi de ce mouvement.

Alors Quo vadis ? Les auteurs relèvent à juste titre la nécessité pour la France de devoir forger des alliances, sans toujours en revendiquer le leadership, en Europe bien sûr mais aussi avec les Etats-Unis en matière de sécurité et dès lors qu’il s’agit de procéder à des opérations militaires. Même dans le domaine de la culture, qui fait tout autant la fierté de la France que l’admiration du monde, c’est désormais le Congo, autrefois colonisé par la petite Belgique, qui abrite la plus grande population de langue française.

Mais si la politique a son rôle, les hommes ont le leur. Il y quelques années La Nouvelle Ligne entendait Jean-Luc Mélenchon déclarer que « la laïcité, c’est comme la pénicilline, c’est universel ». Or non seulement il n’en est rien mais la laïcité est au contraire une exception mal comprise à l’étranger. Quant à son rival jupitérien, Emmanuel Macron, il aspire à s’inscrire dans la lignée des grands hommes qui ont fait la France.

De Gaulle ou Churchill?

De l’avis de La Nouvelle Ligne, pour l’heure la France a davantage besoin d’un Churchill que d’un De Gaulle, un Churchill qui ait à la fois le courage et l’humilité de n’être en mesure de lui promettre que du sang, du labeur, des larmes et de la sueur.

Illusions, Déceptions, Horizons, voilà les têtes des trois parties qui structurent l’ouvrage. Pour passer de l’une à l’autre, les auteurs, à la suite de leurs interlocuteurs à l’étranger invitent la France à ouvrir les yeux sur elle-même, la condition nécessaire pour qu’elle puisse faire entendre sa voix, une voix en vérité et en prise avec la réalité du monde.

Richard Werly et François d’Alançon, Le Bal des Illusions, Grasset, 2024.

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